Tattoo - Age
Safwan de Banlieue Rouge par Pat k.
En plus d'être le chanteur-guitariste
de Banlieue Rouge, Safwan est aussi un excellent
tatoueur. Entrevue réalisée
à son studio pendant une scéance de tatouage, pas sur moi
malheureusement.
C'est quoi le lien entre tatoo et Punk-Rock pour toi ?
Safwan : Peut-être
l'identification de la personne, la prise de conscience de son identité.
Le
punk-Rock, c'est quelque chose d'assez
démonstratif, le tatouage peut l'être aussi, des fois c'est
très personnel. Le lien le
plus direct, c'est que souvent les gens qui affectionnent l'un affectionnent
l'autre, mais il n'y a pas vraiment
de lien direct. Le tatoo est quelque chose d'ancestral,
presqu'autant que la musique mais
il faudrait que je réfléchisse à cette question-là.
Qu'est-ce qui t'a amené à faire du tatoo ?
Safwan : Tu sais que
je faisais beaucoup de dessin, pour des affiches de concert, pour le groupe,
etc. Et vu que j'avais de l'intérêt
pour le graphisme, un moment donné j'ai découvert que le
tatoo,
c'était un domaine au niveau
graphique, au niveau de la création dans les arts visuels qui était
super
ouvert et intéressant et
que c'est une job très gratifiante, c'est-à-dire que tu vas
faire un dessin et ça
va rester. Pas juste imprimé
sur un mur ou sur un logo de t-shirt ou sur un disque, mais à vie
sur la
personne qui le porte, c'est ça
qui est le fun. C'est le fun à faire et il y a tout un côté
technique qui
est ben intéressant dans
le tatouage. Le défi du dessin à un moment donné,
si tu as envie de rester
dans les mêmes paramètres
de dessin que tu as, tu finis par avoir couvert un peu tout, tandis que
dans le tatoo c'est jamais terminé,
il y a toujours quelque chose à voir, à apprendre, à
fignoler, à
améliorer, à essayer.
C'est ça qui m'a amené à faire du tatoo. Je me suis
rendu compte que les
possibilités étaient
quasiment infinies, ça m'a poussé à aller voir plus
loin.
Comment as-tu commencé à tatouer? Par plaisir ou pour en faire une profession?
Safwan : C'est le genre
de truc que tu ne peux absolument pas faire à moitié, la
vision juste pour le
fun elle vient juste entre"est-ce
que je veux en vivre?"ou"Je vais en faire et je ne me soucierai pas
du côté sous de l'affaire".Malheureusement
pour ben du monde,faire du tatouage ça prend du bon
équipement, des bons produits,
l'espace qui est adapté,donc forcément un moment donné,t'es
obligé de tenir compte de
tout ça. Ce qui m'a intéressé à ça,
c'est d'être confronté à ce milieu-là
assez facilement.Les dessins que
je faisais, y'avait du monde qui les montrait à d'autres, qui les
faisait circuler et il y a des tatoueurs
qui sont venus me voir pour me demander de leur faire des
dessins. Je trouvais souvent que
de la manière dont ils rendaient le dessin que moi j'avais fait,
que
ça pouvait être mieux,
fait que je me suis dit que je pourrais essayer de le faire. Et ces gens-là
m'ont dit qu'ils pensaient que j'avais
les aptitudes, donc ils m'ont montré les bases qu' eux
connaissaient à l'époque
et depuis j'ai été un petit peu plus loin, j'ai avancé,
j'ai rencontré des gens.
Et cette année, j'ai eu l'occasion
de voyager avec Banlieue Rouge, je suis allé en Europe et là
j'en ai
profité pour aller visiter
des tatoueurs européens que ça faisait vraiment longtemps
que je voulais
rencontrer. Et qui justement étaient
amateurs et qui sont venus aux concerts, ils ont bien aimé ça
et
ils sont bien dans cette mouvance-là.
Depuis combien de temps est-ce que tu fait du tattouage?
Safwan : Ça
fait environ 2 ans. J'ai eu la chance pendant ces 2 années-là,
au moins pendant 1 an et
demi, de tatouer sur une base régulière,
c'est-à-dire que c'est mon occupation jour pour jour. Et
ça, ça m'a aidé
à progresser super vite. Et j'ai eu une autre chance de ne pas commencer
tout seul
chez moi, j'ai eu des gens pour
m'épauler, pour m'empêcher de faire les erreurs qu' eux avaient
fait
et à ne pas aller dans une
direction plutôt qu'une autre. Il y a des notions qui sont techniques,
qui
sont ben plattes mais nécessaires,
au niveau de la stérilisation, de la fabrication des aiguilles,
du
micro-réglage de tes machines,
la compréhension de qu'est-ce que c'est, tout le procédé,
la
dermatologie du tatouage. J'ai eu
la chance d'avoir des gens qui me l'ont expliqué. Pas juste des
traités, pas juste de la
paperasse, de la théorie. Et aussi beaucoup d'amis qui m'ont dit
"J'en ai un
bout de peau, aweyes, vas-y, roules-moi
ça". Et ça, ça m'a donné un super gros coup
de main,
c'est clair. Les premières
personnes qui m'ont montré à tatouer m'ont pas nécessairement
appris la
meilleure manière, mais ils
m'ont montré ce qu'ils savaient et déjà, c'est beaucoup
mieux que rien.
Qu'est-ce qui t'inspire quand tu crées tes propres dessins ? Est-ce que tu préfères le tribal ou le figuratif ?
Safwan : Le tribal,
j'aime ça créer ça parce que c'est des formes efficaces.
Il y a une longue
tradition, la tradition polynésienne,
les Maoris, les Néo-zélandais, ça m'inspire beaucoup
à ce
niveau-là, mais moi ce que
je vais créer, à la base, c'est ce que les gens ont catégorisé
comme
NEW-SCHOOL. Les gros traits bien
solides, les couleurs bien flashantes. J'aime ça que ça
colorbomb, que ça ressorte
beaucoup. À partir de là, ce qui m'inspire, c'est les sujets
classiques du
tatouage et les rézumis,
les tatouages japonais. Je trouve qu'ils ont des sujets et des façons
d'amener leurs formes vraiment intéressantes,
que je refais à la façon occidentale, parce que je suis
influencé par où je
vis. Mais le tatoo, c'est la personne qui vient te voir et qui te dit :
"j'aimerais
avoir ça". C'est cette personne
qui t'amène l'imagerie, l'idée de départ et tu brodes
à partir de ça,
dans les paramêtres que la
personne t'a donnés, ce qui est aussi un défi de mettre ta
touche dans
quelque chose qui n'est pas ton
idée.
Est-ce que tu crois que tu as atteint ton plein potentiel?
Safwan : Honnêtement,non.
C'est sûr que non. C'est un petit peu cette chance qu'on voulait
se
donner en ouvrant notre propre studio,
un studio qui suit les normes d'éthiques dans le cadre de ce
qu'on voulait avoir pour travailler.
Si on se donne un an et demi bien rempli comme en ce moment,
on va atteindre un niveau qui s'acquiert
avec l'expérience, expérimenter différentes sortes
de peau,
de dessin, d'endroits. On a eu la
chance de se faire amis avec des tatoueurs très cotés dans
le
monde, parmi les meilleurs et qui
méritent leurs réputations. Et on continue, on a des projets,
on
veut aller à San Francisco
se mettre sur un plan international. Encore un an et demi et je devrais
avoir atteint un bon niveau. Déjà,
j'ai un niveau défendable, ce dont je n'étais pas sûr
mais que j'ai
pu me rendre compte en voyageant,
voir ce que les autres faisaient, ailleurs que dans les magazines.
Je suis content de ce que je fais,
j'aime ce que je fais et les gens, en général, aiment aussi
ce que je
fais, ils partent avec le sourire
et reviennent me voir avec le sourire, c'est un bon indice.